A Davos, David Cameron fait la leçon à l’Europe

 

 

 

Pour le Premier ministre britannique qui s’exprimait hier à Davos, la crise européenne n’est pas seulement un problème de dette, mais également de déficit extérieur. Et d’égrener les solutions à mettre en oeuvre rapidement.

 

Réglez votre problème avant qu’il nous retombe dessus ! C’est d’ores et déjà l’un des principaux messages du 42 e Forum économique mondial de Davos.


 

Il s’adresse à l’Europe et vient aussi bien d’un gérant américain de fonds que d’un universitaire chinois, d’un industriel sud-africain que d’un ministre latino-américain. A tel point que la commissaire européenne Nelly Kroes, intervenant dans un débat sur les dangers d’un monde hyperconnecté, s’est sentie obligée de préciser que l’euro survivrait ! Dans ce climat d’inquiétude, David Cameron a fait entendre sa voix haut et fort. Devant une salle comble, le Premier ministre britannique, dont l’excentricité se limitait au noeud de cravate légèrement décalé, s’est permis de donner une implacable leçon aux Européens.

Dans une Union en proie à la stagnation économique, où la dette publique par tête a augmenté de 4.500 euros en quatre ans, « c’est un temps pour l’audace, pas la prudence ». David Cameron a d’abord vanté… sa propre hardiesse : premier gouvernement de coalition depuis soixante-dix ans, programme à cinq ans, gel de la paie des fonctionnaires, réforme des retraites du secteur public. Il a aussi critiqué les décisions européennes qui, selon lui, plombent la croissance – directive sur le congé maternité, sur le temps de travail, projet de taxe sur les transactions financières -une « folie » qui réduirait le produit intérieur brut (PIB) européen de 200 milliards d’euros, selon les propres calculs de la Commission européenne.

Ensuite, le Premier ministre britannique a expliqué aux Européens ce qu’ils devaient faire pour résoudre la crise de la zone euro. « C’est là que l’Europe doit être la plus audacieuse. » Il a salué le soutien aux banques de la Banque centrale européenne et les efforts « courageux » de plusieurs pays pour rétablir leurs comptes publics et laisser une portion supplémentaire de leur souveraineté à Bruxelles. Mais ça ne suffit pas. Les taux d’intérêt élevés dans de nombreux pays pèsent sur l’investissement. « Il faut mettre un terme à l’incertitude en Grèce. Recapitaliser les banques. Et comme l’a dit le Fonds monétaire international (FMI), le pare-feu européen doit être assez élevé pour affronter la crise dans toute son ampleur. » Ca, c’est pour le très court terme.

Il faut aussi agir à long terme. « Je ne suis pas de ceux qui pensent que les monnaies uniques ne marchent jamais. Regardez l’Amérique. Ou le Royaume-Uni. Mais il y a des traits communs à toutes les unions monétaires réussies. » Une banque centrale qui soutient le système financier. Une intégration économique profonde. Un système de transferts budgétaires et une émission commune d’obligations qui peut apaiser les tensions entre pays. Ici, David Cameron donne l’estocade : « Ce n’est pas que l’Europe n’a pas tous ces dispositifs, mais qu’elle n’en a aucun. »

En politicien expérimenté, il prend les références qui l’arrangent – le FMI sur le pare-feu, Angela Merkel sur la maîtrise de la dette publique ou Nicolas Sarkozy pour l’embargo sur l’Iran. Le professeur a presque terminé sa leçon. « Oui, la discipline budgétaire est essentielle. Mais c’est un problème de déficit extérieur, pas juste de déficit budgétaire. Et cela signifie que les pays avec ces déficits devront prendre des décisions douloureuses pour accroître la productivité et réduire les coûts année après année pour regagner leur compétitivité. » La salle applaudit. Côté européen, on ne voit pas bien qui pourra lui répondre.